Voyage moto sur les pistes du Sud du Maroc avec les copains (EP1)

C'est le premier épisode de mon histoire d'un voyage moto au Maroc. 10 jours à rouler entre potes sur les pistes du sud du pays dans de sublimes paysages. Sur le papier, rien d’insurmontable, non ? C'est sans compter sur mon grain de sel (et mon incapacité à rouler dans le sable). Au programme de ce périple : un embrayage cramé dans le désert, des dunes à perte de vue et une escale en petite suisse marocaine. Bonne lecture !

Commençons par une présentation succincte de l'équipe. Notre quatuor est composé de Greg, accro à la moto et ancien pilote de rallye qu’Ixtem Moto sponsorise ; Radu, un pote que tu connais forcément si tu as suivi mes aventures sur la rando des deux mondes ; et Jean-Michel qui a beaucoup bossé sur la conception des traces avec un lourd bagage en trial. Et moi, avec mon niveau habituel en tout-terrain (tires en les conclusions que tu veux…). Bref, comme lors de la Gibraltar Race, je ne suis clairement pas le plus expérimenté.Et pour les bécanes ? Que des européennes ! KTM 990 pour moi, 890 pour Jean-Michel, Aprilia Touareg pour Radu et enfin la Triumph Tiger 800 XCX de Greg. Voilà notre équipée !

Nous voici arrivés à Sète pour prendre un ferry direction Tanger. Première mauvaise nouvelle ? Le bateau a quasiment 10 heures de retard ! Quelle galère. Nous poirautons sur le parking, alternant discussions et admirant les camions surchargés. Les chargements sont parfois improbables. Certains passagers font la sieste à l'ombre des camions. Il y a beaucoup de familles qui rentrent au pays pour la fête de Aïd El-Kébir.  S'en suit une traversée de 40 heures. Nous profitons de ce temps long pour faire mieux connaissance au sein de notre quatuor.

Arrivés à Tanger et rebelote c'est le chaos à nouveau ! Pour faire simple ? 15 douaniers montent à bord pour contrôler pas moins de 2000 personnes. Avec ce ratio de 130 passeports à inspecter par contrôleur, l'opération dure plus de 2 heures. Nous buvons une bière avec les copains en attendant. Ça sera sans doute la dernière avant un bon moment ! Finalement, nous obtenons le coup de tampon salvateur, précieux sésame nous permettant d'entrer au Maroc. Mais ? Il reste encore à faire la paperasse pour les motos. C'est parti pour une heure d'attente supplémentaire. Une fois tout l’administratif balayé, nous filons à Tanger, récupérons les clés de notre appart, avant de prendre le cap vers le centre-ville pour déguster de bonnes fritures de poisson. Délicieux ! Seuls des locaux sont attablés autour de nous : les joies de la basse saison.

Tanger - Chefchouaen - Ifrane

Aujourd'hui, c'est journée acclimatation alors nous y allons gentiment. Il faut dire que nous ne sommes pas tellement habitués à cette chaleur : plus de 40°C ! Nous filons donc sur route uniquement. La destination ? Chefchouaen, où nous en prenons plein les yeux. C'est vraiment le décor de carte postale avec ces petites maisons bleues s'étalant au pied du mont Djebel Mezedjel. Splendide !

Chefchouaen - Ifrane

Nous continuons par la route jusqu'à Ifrane. Pourquoi diantre alors avoir déballé l'armada de trails ? Pour profiter des pistes du sud du pays. Nous avons donc décidé de faire une première grosse journée par le bitume pour gagner du temps. 360 km nous séparent d'Ifrane. 360km à découvrir l'incroyable diversité des décors marocains. Les paysages se suivent mais ne se ressemblent pas. C'est-à-dire ? Eh bien, après l'atmosphère très minérale et urbaine de Tanger, puis l'ambiance plus sauvage de Chefchaouen, nous rallions maintenant les forêts verdoyantes d'Ifrane. Pour que tu rendes compte : cette ville est surnommée la petite Suisse marocaine. En fait, seule la présence des singes nous rappelle que nous sommes en Afrique et pas chez les helvètes. J’exagère à peine !

Ifrane - Midelt – Imichil

Cette journée de tout-terrain commençait si bien…

Nous débutons avec une superbe matinée de pistes. La trace est plutôt roulante, nous alternons entre paysages désertiques et zones montagneuses très boisées. Décidemment, cette incroyable palette de décors est étonnante ! Comment vont les motos ? Pour l'instant, aucun souci à signaler. La 990 tourne plutôt bien. Spoiler alert : ça ne va pas durer.

Nous rallions maintenant Midelt, une ville où l'on s'étonne de voir cohabiter des sapins avec des dattiers ou des oliviers. Une pause s'impose. Nous prenons le temps de déjeuner. Un peu trop d'ailleurs. Le repas s'éternise si bien que ça nous met un peu dedans pour la suite de nos aventures.

Nous réenfourchons les motos. Cap sur le cirque de Jaafar ! Les premières kilomètres de pistes sont vraiment super agréables. Pas technique pour un sou ce qui nous permet de profiter à fond des paysages bruts et rocailleux de cette région difficile d'accès. Nous nous enfonçons dans les gorges quand le premier vrai obstacle se présente : une descente bien raide. La géologie locale est coupée à la serpe ! Notre technique ? Nous progressons moteur coupé. Tant bien que mal, nous avançons, mais c'est chaotique. Et surtout, faire demi-tour une fois en contrebas est devenu impossible.

J'atteins mes limites en technique de pilotage moto

Arrivés au fond des gorges, nous pouvons respirer. Ce lit de rivière d'habitude en eaux est aujourd'hui complètement sec. Mais ? Cela reste très piégeux car les caillasses roulent sous les pneus. En plus, sous ce tapis rocheux se cache un limon meuble au possible. Nous alternons donc entre dur et mou. Ça part dans tous les sens. C'est là que les choses se gâtent. Pourquoi ? Nous pénétrons maintenant dans une zone très enduro pavée de gros rochers. Et surtout, il est déjà tard lorsque nous entamons cette section ardue.

Greg et Jean-Michel, avec leur bagage technique issu du trial et du cross, souhaitent persévérer. Pour Radu et moi, le challenge parait faisable mais pas à cette heure aussi tardive. Je reste convaincu que nous aurions pu passer avec un peu de temps. Nous prenons alors la décision collective de faire demi-tour. Le vote n'est pas unanime mais la raison l'emporte. Le hic ? Impossible de remonter par où nous sommes descendus. Trop dangereux et difficile. Finalement, nous trouvons une piste qui remonte. Là encore les rigoles et les grosses caillasses nous donnent du fil à retordre mais nous parvenons à grimper et contourner le cirque de Jaafar.

Une emmerde n'arrive jamais seule

Un peu plus loin, nous rattrapons le tracé initial, et c'est là que tout déraille. Le topo ? Nous commençons par nous retrouver devant un plan d'eau intraversable. Il y a un barrage à quelques kilomètres. Nous décidons de contourner l'obstacle. Pour l'instant, tout va bien...

Il commence à faire sombre, la route que nous suivons se désagrège progressivement se transformant en piste casse-tronche, et finalement nous nous retrouvons à nouveau dans un lit de rivière très piégeux. Je finis même par me tanker dans un bras de rivière. La suite, tu la devines déjà : je chute. Et ouais, fatigue physique et stress ne font pas bon ménage. Résultat des courses : il est 19h et il nous reste encore plus de 100 km à parcourir. Il faut faire demi-tour à nouveau. À ce moment, la tension dans le groupe est palpable mais nous parvenons à faire front tous ensemble.

Osmand, Ways, Map.me : nous utilisons tous nos outils de cartographie pour trouver une alternative. Finalement, nous réussissons à rallier une route. Le hic ? Elle est en mauvais état, et surtout elle ondule de manière erratique dans des cols de montagnes. Me concernant, mon éclairage additionnel et mon habitude ce type de condition me permettent de rouler sereinement. Ce n'est pas le cas de Radu. À plusieurs reprises, il se fait peur. La situation est compliquée…

C'est à 23h que nous rallions l'hôtel, bien loin des 19h initialement prévues. L'accueil ? Extraordinaire. Évidemment, je les avais prévenus du retard. Mais quand même, ils nous attendent avec des grands sourires et du thé chaud. Un délicieux tajine de poulet conclut à merveille cette journée pour le moins chaotique. La bienveillance marocaine est réconfortante.

Imichil - Dadès – Skoura

Malgré une nuit très reposante, la journée d'hier a laissé des traces. La fatigue se fait déjà sentir. Alors au petit-dej, j'essaie d'établir des règles pour éviter les mésententes d'hier. Le deal ? Si à 17h, nous sommes encore loin de l'objectif de la journée, alors Radu et moi finissons la journée par la route. Greg et Jean-Michel, les plus aguerris, pourrons quant à eux continuer sur la piste. Rester ainsi en binôme permet de rouler toujours en sécurité. Voilà, j'espère que cette stratégie permettra de contenter tout le monde. L'avenir nous le dira.

La 1ère partie de journée se déroule merveilleusement. Les paysages sont sublimes et les pistes délicieuses. Nous prenons un plaisir fou à rouler tous ensemble dans ce cadre extraordinaire. Passé Dadès, nous alternons entre piste et route, constamment cernés par des paysages toujours aussi somptueux. Des difficultés aujourd'hui ? Pas vraiment. Cette trace assez roulante est un vrai régal en comparaison du chaos de la veille.

Nous terminons cette journée magnifique à Skoura, une ville entourée par une gigantesque palmeraie de 25 km². Notre arrivée à 17h à la kasbah nous permet de profiter de la piscine tranquillement et aussi d'apaiser les tensions dans le groupe. Et oui, on ne va pas se mentir, il y a toujours des désaccords et des compromis à faire quand on roule à plusieurs. Alors, forcément, quand la fatigue et le stress sont de la partie, c'est délicat. Les frustrations sont plus difficiles à accepter. On sort de sa zone de confort.

Le premier épisode de cette aventure entre potes touche à sa fin. Ce que j'en retiens ? Les paysages marocains sont d'une diversité exceptionnelle. Je ne m'attendais vraiment pas à une si belle palette de décors. Et puis, accessoirement, je réalise que je prends davantage de plaisir avec ma vieille KTM 990 Adventure sur des pistes roulantes que sur des traces plus techniques. Son terrain de jeu, c'est les grands espaces. Il y a aucune électronique sur cette moto relativement lourde mais un moteur incroyable qui aime filer au vent. La suite de l'aventure confirmera ce ressenti.

----> Lire le deuxième épisode sur mon Voyage moto au Maroc entre potes

Crédit photos : Jean-Michel, Greg et Radu. Les photos avec aspect kodak chrome sont les miennes. Il faut que je change de téléphone :)